Communication de Marc JUSTAFRE
L'exercice héréditaire des fonctions
seigneuriale et municipale
dans une communauté du Vallespir sous l'Ancien Régime.
Las Illas, un village montagnard du Vallespir, se situe à un
dizaine de kilomètres de Céret, à la frontière
franco-espagnole. Au XVIIIe siècle, la communauté des
habitants est dirigée par la famille Justafré, dont
la branche principale réside sur leur propriété
dite lo mas Duran , qui devient au XIXe siècle lo
mas Batlle. L'acquisition des autorités seigneuriale et
municipale par cette famille au sein de la communauté et sa
conservation sont le fruit d'une triple prépondérance
: la permanence de cette lignée qui forme une casa païral
[1], une première place dans le foncier qui lui assure une
prospérité économique, et la confiance du seigneur
de Las Illas qui en fait son agent local. Nous pouvons nous demander
comment cette famille gère l'exercice de ces fonctions qui
la placent entre le seigneur et les habitants, leurs intérêts
propres et ceux de la communauté.
Une casa païral.
La famille Justafré est la plus ancienne que nous connaissions
à Las Illas. La mention se trouve dans un codicille à
un testament de 1399. Elle y est également possessionnée
depuis cette époque. Ses membres ont le statut de pagès,
de paysan aisé. A la fin du XVe siècle, Bernat Giscaphre
fait partie des chefs des quatre feux recensés à Las
Illas. Son petit-fils, Michel Justafré dit Michalot,
se voit confirmer par Pierre de Darnius le 23 janvier 1551 la possession
de deux manses dans la seigneurie : " duas mansatas meas una
quarum vocatur mas de Casa Nilla et altera vocatur Casa[n] Dura[n]
" [2]. Il est un des rares chefs de famille a être recensé
au fouage de 1553. Michalot Juscafreda est alors baille [3]
de Las Illas. Cette fonction est encore occupée en 1789 par
un Michel Justafré, lequel est un des plus importants propriétaires
fonciers de la seigneurie. Il appartient à la branche cadette
des Justafré installée au milieu du XVIe siècle
sur le manse Duran, la branche aînée conservant
celui de Casa Nilla. Progressivement, sa famille détient
et exerce plusieurs charges de la vie municipale et religieuse dans
la communauté, en lieu et place de la branche aînée
en déclin. Elle est un des acteurs influents et prépondérants
de la vie des habitants de cette localité au XVIIIe siècle.
La longévité de cette famille et ses ramifications lui
ont permis de concentrer le pouvoir sur la vie municipale et de le
conserver.
Le pouvoir municipal et son exercice à Las Illas.
Les affaires importantes de la communauté sont discutées
au Conseil Général des habitants, qui regroupe tous
les chefs de feu. Chacun selon sa condition, brassier, métayer
et pagès, y participe, y a la parole et le droit de vote. Nous
ignorons le fonctionnement précis du Conseil Général
de Las Illas au XVIe siècle, ainsi que sa composition et la
fréquence de ces réunions. Cependant, même si
nous ne trouvons pas de mention de consuls au XVIe siècle,
une organisation municipale existe, puisque des pagesos représentent
la communauté en diverses occasions, lors d'un procès
en 1556 avec le seigneur à propos des droits de pacage et en
1579 lors de la concession de l'exploitation d'un bois à un
menuisier de Céret. En 1619, quatre pagesos de Las Illas reconnaissent
au nom de la communauté leur nouveau seigneur : " intervenerunt
et presentes fuerunt honor[] Michael Justafre baiulus, Antichus Justafre,
Petrus Justafre et Joannes Mas omnes probi homines et singulares dicti
termini " [4]. Cette mention nous montre que la famille Justafré
s'est ramifiée en trois branches. Ses membres détiennent
trois grands mas sur les cinq qui existent à Las Illas.
Jusqu'à la fin du XVIIe siècle, le nombre de feux et
donc celui des chefs de famille composant le Conseil Général
est réduit à moins d'une dizaine de personnes. Dans
cette assemblée la famille Justafré est largement représentée.
En 1666, alors que la seigneurie compte environ neuf tenanciers, six
hommes de Las Illas interviennent pour nommer deux d'entre eux syndic
afin de convenir d'un contrat sur les herms, les droits de pacage
et de boisage avec le seigneur du lieu. Ils représentent la
communauté et appartiennent pour la majorité aux grands
mas. Quatre d'entre eux font partie de la famille Justafré
: " son estat p[rese]nti los honors Joseph Mas ["Marill"
avait été écrit avant] balle de dit lloch, Joseph
Justafré y Miquel Justafré lo p[rese]nt y corrent any
consols dedit lloch y terme de Las Illas, Joseph Cardona, Miquel Justafré
ats Calot et Pera Miquel Justafré tots homent singulars y habitants
dedit lloch y terme de Las Illas es la major y mes sana part "
[5]. Nous voyons apparaître la fonction de consul, qui est alors
exercée par les deux représentants les plus influents
des branches Justafré. Toutefois, au milieu du XVIIe siècle
la charge de baille n'est pas conservée par cette famille,
puisqu'elle est alors détenue par Joseph Mas. Il existe donc
un partage des fonctions seigneuriales et municipales entre les grands
propriétaires de Las Illas au XVIIe siècle. La communauté
des habitants apparaît réduite mais organisée.
Vers l'hérédité de la fonction de baille.
Du XVe au XVIIe siècle, la charge de baille n'est pas l'apanage
exclusif de la famille Justafré. La nomination de cet agent
seigneurial est à la discrétion du seigneur, qui choisit
l'homme le plus apte, le plus fidèle à le représenter
et à défendre ses intérêts vis-à-vis
de la communauté. Après le décès de Michel
Justafré en 1555, la fonction est exercée par un dénommé
Lorens Canta. L'héritier du défunt, Antich Justafré,
n'a alors que cinq ans. La charge est récupérée
au début du XVIIe siècle par une branche collatérale,
représentée par Michel Justafré en 1619. Non
pas celle d'Antich, alors fortement endettée, mais celle de
son neveu, qui perpétue le pouvoir économique et municipal
de cette famille sur Las Illas. Nous retrouvons des mentions de Michel
Justafré baille de Las Illas de 1617 à 1647, ensuite,
alors que Michel Justafré est encore vivant, c'est Joseph Mas,
pagès de la Costella (une importante métairie) qui exerce
cette fonction de 1662 à 1676. Nous pouvons émettre
deux hypothèses sur ce changement : une incompatibilité
d'humeur avec le seigneur (ce qui nous paraît improbable) ou
un âge avancé du détenteur. Michel Justafré
dans les années 1660 a environ soixante-dix ans. Mais la fonction
n'est pas transmise immédiatement à son fils Joseph
Justafré, lequel doit attendre 1677 avant de l'obtenir.
Ce petit historique de la transmission de la charge de baille de Las
Illas montre qu'il n'existe pas d'hérédité jusqu'à
la fin du XVIIe siècle. C'est au bon vouloir du seigneur. Cette
commission a une limite dans le temps puisqu'elle est renouvelable
à chaque nouveau seigneur. Elle s'achève avec le décès
ou la démission du détenteur. Nous ne connaissons pas
d'exemple ici de révocation ferme, chaque démission
prononcée est dite " sans marque d'indignité ".
Ainsi une situation démographique calamiteuse, une ruine économique,
peuvent exclure les membres d'une famille et interrompre cette continuité
de l'exercice de la fonction de baille. C'est pour le seigneur tout
son intérêt de choisir l'homme le plus compétent
et le plus influent dans la communauté car les tâches
sont multiples.
Le baille est un commissaire seigneurial. Il exerce des fonctions
de justice et de police au sein de la communauté par délégation
seigneuriale. Le 7 avril 1619, le représentant de François
Pons de Vilanova, nouvel héritier de la seigneurie de Las Illas,
révoque Michel Justafré de sa charge de baille : "
dictum Michaellem Justafre baiulum predictum asuo ipsius baiuli osticio
incontinenti destituit amovit et revocavit ", pour immédiatement
le réintégrer dans la même fonction avec les signes
des juridictions civile et criminelle, moyennant la prestation d'un
serment et d'un hommage de fidélité : " dictus
Joa[n] Vinyes dicto no[]ie dictu[] Michaellem Justafre in baiulum
dicti termini de Les Ylles creavit recepto a dicto Justafre sacramento
et homagio, et convenit et p[]missit q[] dictum baiuli asticiu[] exercebit
de quibus ".
Au milieu du XVIIe siècle, le seigneur de Las Illas est Joseph
d'Ardène , comte d'Ille, héritier de la baronnie de
Darnius et donc de la seigneurie de Las Illas. Dans le conflit opposant
les royaumes de France et d'Espagne, Joseph d'Ardène s'est
engagé dans le parti pro-français ; maréchal
de camp de Louis XIII, il est devenu un des lieutenants généraux
des armées de Louis XIV. Pour les services qu'il a rendu pendant
plus de vingt ans dans les armées royales, en juillet 1661,
Louis XIV lui octroie les droits de haute et de moyenne justice, qui
s'ajoutent à celle de la basse justice qu'il exerçait
déjà sur sa terre de Las Illas, seigneurie que le souverain
érige alors en comté : " Avons icelle terre des
Illes circonstances et dépendences d'icelle et les annexes,
acquisitions et augmentations qui ÿ pourront estre faictes cré[é]es
érigées et eslevées, créons érigeons
et eslevons par ces d. présentes en tiltre, qualité,
dignité, et prééminence de Comte soubs le nom
et appellation des Illes, et aux mesmes armes qu'il a cÿ-devant
porté en qualité de Comte de Ille, laquelle comté
relévera doresnavant nuement et immédiatement de nous
en pleine foÿ et hommage à cause de nostre comté
de Roussillon " [6]. En conséquence et comme symbole de
son autorité judiciaire, Joseph d'Ardène peut alors
" faire dresser potences et fourches, patibulations suivant la
coustume des lieux et telles qu'il est loisible à un compte
de l'y pouvoir faire eslever ". Finalement le roi lui accorde
" le droict et faculté de présider les nobles lorsque
les estats du comté de Roussillon, Conflens pays adjacens seront
assemblées et de conduire la noblesse des d. pays quant la
nécessité de nos affaires ou celle de nos successeurs
roy[]x y obligera, d'ÿ convoquer le ban et arrière ban,
et ce par prefference et à l'exclusion de tous autres, voulons
et nous plaist que les d[] droicts demeurent annexés, joincts,
unis et at[t]achés au d[] comte des Illes, tant et si longuement
qu'il sera possédé par le d[] Don Joseph D'Ardennes
et ses successeurs venants de luÿ en légittime mariage
". Voilà une grande noblesse et un statut très
honorifique pour une petite seigneurie en terre et en tenanciers.
Joseph Mas est alors le baille du comté de Las Illas. Certainement
après le décès de Joseph d'Ardène en 1677,
Joseph Justafré devient le nouvel agent seigneurial. A partir
de lui, la charge se transmet sans interruption à chacun de
ses descendants jusqu'en 1789. Sa famille est proche de la veuve de
Joseph d'Ardène. En 1683, " la Ex[]ma senyora dona Llusia
Isabel de Ardena de Arago ÿ de Aÿbar viuda relicta del Ex[]m
senÿor don Joseph de Ardena ÿ de Darnius q° compte de
dit lloch de Las Illas llochtinent general en las armadas del reÿ
nostre senÿor (que Deu prospere) en las villas de Paris Perpinÿa
ÿ de Illa respectivement lo die de son obit popular " fait
partie des personnes qui ont organisé le mariage entre Joseph
Justafré, fils du baille de Las Illas, et sa lointaine cousine
Madeleine Justafré, fille d'un autre pagès. Orpheline
dès 1674, la jeune Madeleine avait été prise
au service de la comtesse, laquelle pour la remercier des services
rendus lui fait donation de " vint sents blanchs a raho de nou
plata per sent blanch ", payables sous la forme d'une pension.
Le mariage est célébré à Ille-sur-Têt
le 2 mars 1683.
La lignée de Joseph et de Madeleine Justafré est alors
au service de la famille d'Ardène et des comtes de Las Illas.
Après le décès de son père le 25 janvier
1694, c'est Joseph Justafré qui lui succède dans la
fonction de baille. Il est qualifié de tel dans un acte de
baptême d'octobre 1694. Lors de la nouvelle prise de possession
du comté de Las Illas en juin 1718, Joseph Justafré
est reconduit dans sa charge " avec les honneurs et salaires
qui ÿ sont deubs " [7]. En 1727, il profite d'une nouvelle
cérémonie pour transmettre le flambeau à son
fils Pierre Justafré : " Et tout incontinent sans pourtant
note d'infamie a révoqué de la charge de Baille dud[it]
terroir ledit Joseph Justafré par la remise du baton par luy
faite et à de nouveau créé et député
pour baille du même terroir Pierre Justafré son fils
avec tous les honneurs droits salaires et prérogatives à
lad[]e charge accordées et desquelles les autres bailles ont
joui lequel icy présent acceptant lad[]e charge par la remise
de la bare ou baston à luy faite par led[it] sieur procureur
a promis de bien et fidellement exercer lad[]e charge et administrer
justice aux habitants en vertu de quoÿ a presté serment
et homage de fidélité entre les mains et pouvoir dudit
Sr Bosch et Verdalet audit nom " [8]. Remarquons que Pierre Justafré
n'est alors âgé que de trente-six ans et que son père
en a soixante-quatre. Ainsi la transmission de la charge s'organise
au sein de la lignée comme celle du patrimoine à l'hereu
(l'héritier désigné), avec la permission du seigneur.
Finalement lors de la dernière désignation d'un baille
par le comte de Las Illas, le 17 mars 1761, nous voyons que l'hérédité
est assurée. En raison de son grand âge (il a soixante-dix
ans) Pierre Justafré démissionne de sa charge de baille
et prie le seigneur d'y nommer son fils Michel. Au vu des qualités
reconnues au postulant, le seigneur accepte : " Pierre Justafré
pages et baÿle dudit lieu de Las Illes exerceroit depuis longues
années la charge de Baÿle dudit lieu et terroir de Las
Illas, et qu'à cause de son grand âge étant plus
que septuagénaire il ne pourroit remplir avec exactitude les
devoirs de sa charge en conséquenceil auroit prié d'accepter
sa démission et de vouloir nommer un autre à sa place
à cet effet ayant égard à la prière et
confiant pleinement de la bonne foÿ, intelligence capacité
et de la bonne vie et moeurs de Michel Justafré fils dudit
Pierre Justafré à cet effet mondit sieur le comte de
Darnius par le présent acte a nommé et nomme ledit Michel
Justafré pages dudit lieu de Las Illas pour Baÿle dudit
lieu et terroir de Las Illas avec tous les honneurs, profits, salaires
et prerrogatives dont ont jouï et jouissent et ont accoutumé
de jouir pareils baÿles " [9]. Le pouvoir judiciaire émanant
du seigneur devient au XVIIIe siècle une exclusivité
de cette famille de pagesos. Il lui permet d'intervenir avec plus
de poids dans la police et dans la vie municipale.
Les missions du baille.
Le serment de Michel Justafré le 17 mars 1761 résume
les qualités et les missions qui sont dévolues au baille
: " Michel Justafré a accepté et accepte ladite
charge de baÿle dudit terroir de Las Illas et a promis et promet
de se bien fidelement et loyalement comporter en l'exercice et fonction
de sa charge qu'il conservera les droits et prérogatives appartenants
à mondit sieur le comte de Darnius, évitera tout ce
qui pourra luy être nuisible et pernicieux et qu'il faira bonne
justice et en particulier pour tout ce qui concerne le service du
Roÿ et l'interest publich et en conséquence il a prêté
son serment et homage de fidélité es mains et pouvoir
de mondit sieur le comte de Darnius ". Cet agent seigneurial
doit être un homme de bonne foi, d'intelligence, de capacité
et de bonne vie et murs. Il est l'homme du seigneur auquel il
est lié par serment, comme dans la chaîne vassalique.
Dans la communauté, il est un notable, dont l'autorité
est symbolisée par un bâton. Sa charge lui confère
également un prestige dans la qualification sociale, d'où
l'appellation d'honor dans les actes notariés. Elle lui apporte
aussi des revenus, puisqu'il prend sa part sur les amendes qu'il peut
infliger aux contrevenants. Dans l'exercice de sa charge le baille
doit tout d'abord préserver les droits du comte de Las Illas,
puis maintenir l'ordre et la justice, et finalement défendre
les intérêts du roi et les intérêts publics.
Il est le lien entre l'action du pouvoir seigneurial et du pouvoir
royal et les droits des habitants dans le fonctionnement de la communauté.
Comment ces missions du baille s'illustrent-t-elles dans le terroir
de Las Illas entre les XVIIe et XVIIIe siècles ?
Comme nous l'avons précédemment observé de 1619
à 1727, le baille dirige les principaux propriétaires
de la seigneurie lors des cérémonies de prise de possession
par le nouveau seigneur. Il préside également les réunions
du Conseil Général des habitants en l'absence du viguier
et du seigneur. Las Illas étant une petite communauté
nous ne possédons que de rares procès verbaux de ces
réunions (1741, 1744, 1761, 1777 1782 et 1787). La majorité
ont un caractère financier, ce sont des conflits sur les impositions
seigneuriales et sur les réparations du presbytère.
Gageons qu'en qualité de principal pagès et contribuable,
le baille est intéressé au premier chef par ces questions.
Cependant il est au Conseil Général d'abord le représentant
du roi et de son seigneur. L'assemblée est autorisée
dans un premier temps par le viguier du Roussillon et du Vallespir,
agent du pouvoir royal, lequel fixe l'ordre du jour et nomme son représentant
: " ordonnons au Baille d'y acister en notre nom et veiller a
ce qu'il ne s'y passe rien contre le service de sa Majesté
" [10]. Cette permission est ensuite accordée par le procureur
juridictionnel du comte de Las Illas : " Permetons a Messieurs
les baille et consuls du dit lieu de s'assambler pour tenir un conseil
général pour délibérer sur les pretencions
que mon dit seigneur Comte a sur la ditte communauté pour la
dixme de la laine ". A cette assemblée de 1741 assistent
donc le baille, Pierre Justafré, et les deux consuls que sont
Etienne Justafré et Joseph Laporte. La réunion a lieu
sur la place publique, devant la maison curiale, c'est-à-dire
à proximité de l'église. D'ailleurs le notaire
de Céret, Me Anglès et Royros, rédige et récite
son acte " dans l'église de Notre Dame des Illas ".
Outre deux témoins pagesos de La Selve, une communauté
voisine, le notaire mentionne quatorze membres de Las Illas présents
à cette assemblée. Nous remarquons dans ce Conseil général
la présence de trois frères Justafré, issus de
Joseph Justafré, l'ancien baille. Le premier intervient en
qualité de baille (Pierre Justafré), le deuxième
en qualité de premier consul (Etienne Justafré) et le
troisième en qualité de tenancier (Julien Justafré).
La population ne conteste pas le paiement de cette nouvelle dîme
et elle nomme un syndic afin de négocier son montant avec le
seigneur. Les membres de ce syndic sont Pierre Justafré, le
baille, et Marc Delmau, le meunier. Important éleveur de moutons
dans la paroisse, le premier saura également défendre
les intérêts de la communauté face aux prétentions
seigneuriales.
En matière de justice, le baille est chargé de faire
respecter les règlements seigneuriaux. Il les annonce publiquement
d'où leur nom de criées. Le 1er juin 1666, Joseph Mas
fait la publication en place de Las Illas du nouveau règlement
sur les herms et le droit de pacage des animaux. Ce contrat emphytéotique
avait été convenu le 27 mai 1666 entre le comte de Las
Illas et le syndic du Conseil Général (Joseph Mas, le
baille, et Joseph Justafré, le premier consul). Ces documents
sont rédigés en la maison de Me Antoni Cavaller, docteur
en droit et juge ordinaire de la cour du baille de Las Illas. Le texte
est certainement lu par Joseph Petit, prêtre de la paroisse
de Las Illas, qui en fait la relation en qualité de substitut
de Thomas Canta, notaire de Perpignan, lequel est le praticien qui
enregistre ces actes. Le baille est donc le dernier rouage de la justice
seigneuriale. Il peut être un agent actif de la police et de
la justice seigneuriale au plan local : d'une part, il dénonce
au juge banneret les bestiaux pignorés [11] et il perçoit
une partie de l'amende infligée à leurs propriétaires
qui contreviennent au règlement seigneurial sur le pacage des
animaux ; d'autre part, il peut témoigner devant ce même
juge pour des affaires de police et de sécurité dans
la communauté. Toutefois son action demeure limitée
comme nous le montre les rares affaires de violence retrouvées
dans les archives.
Le dimanche 16 octobre 1662, vers les sept ou les huit heures du matin
sur la place publique, une querelle éclate entre Michel Solis
et Joseph Petit, le prêtre de Las Illas. Le pagès lui
reproche la mauvaise estimation des dégâts que l'on a
l'habitude de faire dans ce lieu : " Sr rector viu jo denunciant
[Joseph Mas] que arrahonava ab Miquel Solis de dit lloch a cerca de
una consuetut ques diu ÿ ha en dit lloch a cerca doles estimes
dels danÿs se acostuman fer en dit lloch " [12]. Michel
Solis en colère moleste le prêtre qui demande au baille
présent de l'arrêter. Michel Solis sort une dague et
en menace le baille, lequel appelle à l'aide des pagesos proches,
dont Michel Llanso, Michel Justafré mineur, Michel Justafré
majeur et son fils Joseph Justafré. Michel Solis se fraye un
chemin sur la place grâce à sa dague et il s'enfuit.
Par la suite, il est arrêté et maintenu incarcéré
à Las Illas durant l'enquête : " incarceribus vice
comitatus de Les Illas " [13]. Nous ne savons comment s'achève
cette histoire. En revanche, elle nous informe que le baille devait
posséder un lieu pour emprisonner les délinquants. Dans
la métairie Justafré, les derniers propriétaires
nous ont montré dans une cave cet emplacement avec des barreaux
que l'on appelait traditionnellement " la prison ". Le baille
n'est donc pas armé pour arrêter un individu, surtout
armé et qui avait certainement prémédité
son coup. Michel Solis voulait sans doute faire pression sur le prêtre
pour obtenir une meilleure compensation des dégâts qui
lui avait été occasionnés ou il estimait que
le prêtre était responsable du retard du remboursement.
Nous ignorons le détail de cette affaire. Le prêtre,
le baille et les consuls sont des intermédiaires des agents
royaux utilisés pour gouverner la population et se surveiller
les uns les autres. En 1692, le baille et les consuls de Las Illas
doivent, sous la surveillance du curé, distribuer manuellement
une somme d'argent à quelques propriétaires dont les
blés ont été abîmés par le passage
de troupes royales. L'action du baille apparaît limitée
au respect des règlements locaux et au respect de l'ordre public.
En 1701, Jean Cardone pagès de Massanet-de-Cabrenis, une paroisse
voisine située en Catalogne, désire se mettre en possession
d'une maison et de terrains que son père avait acquis à
pacte de rachat, et dont le délai de rachat était arrivé
à terme en 1700. Une sentence de déguerpissement de
l'ancien propriétaire ayant été rendue en sa
faveur, il demande l'assistance du baille de Las Illas pour éviter
tout trouble durant la prise de possession. Le procès verbal
dressé par Me Jean Companyo le Jeune, notaire de Céret,
le 5 octobre 1701 montre que le baille n'a pas de moyen de pression
sur l'occupant de la maison qui refuse d'ouvrir la porte : le juge
" a requis audit baille qu'il lui donne l'assistance deue pour
prendre la possession de les maison jardins propriétés
et feixes mencionnées en ditte requeste et ledit baille après
la lecture des dittes requeste et provision sus dittes à lui
dit baille faite par moy dit notaire à faire offre de metre
icelles et la deue exeqution en vertu desquelles s'est transporté
par devant la susditte maison mencionée en la sus ditte requeste
par devant de laquelle maison ont trouvé Dominique Puig trabailleur
lequel demeure en ditte maison et comme la porte de ditte maison estoit
fermée le dit baille lui a déclaré [?] ouvrir
laditte porte affin de pouvoir prendre ledit Cardona endit nom la
pocession de la ditte maison avec les formalités accoutumées
et ledit Puig a faite de responce qu'il ne prétendoit point
ouvrir ni faire ouvrir laditte porte " [14]. Il ne reste plus
à Jean Cardone qu'à faire le tour de la maison pour
symboliser cette entrée en possession. Ce conflit s'est certainement
réglé par la suite en famille, car tous les protagonistes
de Las Illas et de Massanet-de-Cabrenis (y compris le baille qui se
doit d'être neutre et de faire respecter les décisions
de justice) sont apparentés et engagés dans des affaires
foncières. Le dernier événement que nous pouvons
citer pour illustrer une fonction très limitée du baille
est une opération commando réalisée par des propriétaires
des communautés voisines de Catalogne. En août 1778,
les consuls de Maureillas pignorent sept bufs qu'ils ont trouvés
en train de brouter dans le bois que leur communauté exploite
sur le territoire de Las Illas [15]. Ils refusent de transiger avec
leur propriétaire d'Agullane (paroisse voisine de Catalogne)
venu négocier, mais ils lui restituent cinq bufs et en
conservent deux comme preuve. Un domestique envoyé avertir
le baille et chercher des provisions les informe que celui-ci ne les
autorise pas à emmener les bufs à Maureillas.
Les consuls décident alors de les conserver dans la bergerie
du mas Nou qui leur appartient, et d'attendre le lendemain matin pour
aller informer le baille dont la métairie se situe à
deux kilomètres et demi à vol d'oiseau. Dans la matinée
alors qu'ils sont au mas du baille et attendant celui-ci qui est absent,
le propriétaire des bufs et quelques acolytes viennent
récupérer les bestiaux saisis par la force et les ramène
en Catalogne. L'enquête menée tardivement, en octobre
1778, laisse présager qu'il n'y a pas eu de suite contre les
auteurs de cet acte, qui sont parfaitement identifiés et connus,
mais à l'abri derrière la frontière de la justice
française. Nous sommes ici dans les querelles traditionnelles
entre communautés que les autorités locales savent régler
dans leur sein. L'absence du baille de Las Illas lors de la pignorade
effectuée par les consuls de Maureillas peut s'interpréter
comme une action passive vis-à-vis de cette communauté,
laissant le temps aux pagesos d'Agullane d'intervenir pour récupérer
leurs bêtes.
L'indépendance de ce commissaire seigneurial est donc limité
par son implantation foncière et humaine dans le terroir. Il
a des intérêts propres à défendre tout
en protégeant quand même ceux de la communauté
dont il est un membre influent. En 1761, le seigneur de Las Illas
crée une charge de sous-baille , lequel a le " pouvoir
de dénoncer bans et peines contre les contrevenants aux criées
qui se trouvent faites à la réquisition des prédecesseurs
de mondit Sr le comte de Darnius ou qui pourront être faites
dans la suite " [16] ? Cette fonction subalterne, équivalente
à celle d'un garde-champêtre, est alors occupée
par un brassier. C'est le moyen de donner une représentation
et un pouvoir aux petites gens de la communauté, mais le sous-baille
demeure soumis à l'autorité du baille. En mars 1761,
Antoine Rosau est le premier sous-baille de Las Illas. C'est un homme
en dehors de la mouvance des Justafré, dont les membres et
les alliés sont présents dans l'exercice des principales
charges municipales. Le comte de Las Illas rappelle alors à
Michel Justafré qu'il vient de nommer baille que ses missions
sont la défense des droits et des prérogatives seigneuriales,
le service du roi et la défense des intérêts publics.
Notabilité et concentration des pouvoirs au XVIIIe siècle
au sein d'une famille de la communauté de Las Illas.
La fonction de baille place la famille Justafré dans une
situation d'honorabilité sociale. Elle est rappelée
avec le statut de pagès dans les actes notariés, dont
les contrats de mariage. La liste des témoins et des parents
montrent parfois la présence d'autres magistrats seigneuriaux
aux mariages des enfants Justafré. Lors de son contrat mariage
en 1647, Joseph Justafré fils de Michel Justafré pagès
et baille de Las Illas " fint estas cosas de expres consentime[n]t
de dits sos pares del honors Pau Quinta i Pere Moner sos cunÿats
i del honor Joseph Roÿros son cosi germa i del honor Joa[n] Pere
Carbonell balle de la vila de Ceret i del honor Geronim Carbonell
sos cosins " [17]. Le 29 octobre 1733, sont rédigées
les conventions matrimoniales entre Michel Justafré (dernier
baille de Las Illas) fils de Pierre Justafré pagès et
baille de Las Illas et Thérèse Mas " donzelle fille
légitime et naturelle de Jacques Mas en son vivant pages et
baille du lieu de La Selva " [18]. La stratégie matrimoniale
vient accentuer le phénomène de concentration des pouvoirs
dans une famille et tisser un réseau d'alliance avec les individus
exerçant ces fonctions dans les paroisses voisines.
Les pouvoirs de justice seigneuriale et de police municipale viennent
compléter les autres rouages dominés par la famille
Justafré. Il y a d'une part la puissance économique
de ces pagesos. Le baille de Las Illas est le contribuable le plus
imposé au vingtième : en 1773, sur 21 contribuables
et un total de 86 livres et 10 sols, Michel Justafré (fils
de Pierre) paye 19 livres 19 sols et 6 deniers, son oncle Etienne
Justafré paye 7 livres 4 sols et 6 deniers, et son cousin Joseph
Justafré (fils de Julien) 1 livre et 6 sols [19]. Il y a d'autre
part les charges municipales et religieuses qui sont très souvent
exercées par les membres de cette famille. En 1715, Joseph
Justafré pagès et baille de Las Illas est également
marguillier majeur de l'église. En 1741, son fils Pierre est
baille et son fils Etienne est consul
Nous avons observé
qu'ils font régulièrement partie des syndic nommés
pour défendre la communauté contre les prétentions
seigneuriales. En 1782, à propos d'un conflit sur la dîme,
le syndic comprend Pierre Justafré, le fils du baille, et le
sieur Antoine Anglès, propriétaire du mas Llanso, bourgeois
de Céret (sûrement apparenté aux notaires de cette
ville) [20]. Remarquons que l'acte est signé par Michel et
Pierre Justafré, ce qui montre le développement culturel
de cette famille. Au XVIIIe siècle, ce qui a favorisé
cette prépondérance dans les fonctions au sein de la
communauté est la vitalité démographique de cette
famille. Joseph Justafré (1663-1749) a quatre fils installés
à Las Illas. Ainsi les membres directs de la lignée
du baille ou ses collatéraux et ses cousins se retrouvent alternativement
aux diverses charges municipales. Ce qui laisse penser que les actions
menées le sont en étroite entente et collaboration.
Ce qui n'est pas le cas à La Selve où les habitants
refusent d'exercer la fonction de consul se plaignant des violences
que leur fait subir leur baille. Le 26 février 1714, devant
notaire, ils déclarent que " Pierre Picas et François
Bizern consuls dudit terroir estant passe leur année de consulat
ont voleu faire élection de consuls dudit terroir en la forme
accoutumée et ont proposé aux dits Joseph Picas, Jacques
Bizern, François Puig, François Picas, Antoine Piques
et Bonaventure Picas qu'il faudroit faire consuls lesquels touts d'une
voix ont répondu qu'ils ne prétendent estre consuls
dudit terroir tant que Jacques Mas à présent baille
sera baille dudit terroir causes et raisons suivantes sçavoir
que ledit Jacques Mas baille traite formal à touts les consuls
sans resun et leur menasse de leur couper les bras et les jambes et
permet aussi que les frere[s] et domestiques menassent tant les dits
Srs consuls que les habitants dudit terroir faisant iceux fort bien
et exactement le service du Roÿ et qu'outre cela permet à
ses bergers de faire paitre son betal tant aux bleds qu'autres grains
semés des habitants dudit lieu à cause de sa supériorité
et quant lesdits habitants s'en vont à luy faire plainte du
dommage causé par son bétal et du mal parler de ses
domestiques, leur menasse de leur doner de coups de bastons et par
toute conclusion tant lesdits Srs consuls que les dits habitants ne
prétendent et ne veulent estre consuls ny avoir aucune charge
estant ledit Mas baille et après qu'il dit Mas sera sorti de
baille touts soffrent à concurrir tant au consulat qu'autres
charges nécessaires tant pour le service du Roÿ que pour
les affaires du comun dudit terroir de La Selva " [21]. Ils semblent
avoir été entendus puisqu'en 1729, François Picas
préside en qualité de baille le Conseil général
de La Selve [22]. Mais la famille Mas retrouve cette fonction et la
cumule même avec celle de consul, puisqu'en 1739 Jacques Mas
est baille et consul de La Selve [23]. Notons que cette famille dirigeante
de La Selve est issue d'une branche cadette de celle qui concurrençait
les Justafré au XVIIe siècle à Las Illas. La
lignée principale de la famille Mas disparaît de Las
Illas au début du XVIIIe siècle, laissant la première
place dans la direction de la communauté à la famille
Justafré. Les autres familles de Las Illas, constituées
de nouveaux arrivants, participent aussi à la vie municipale.
Il n'existe pas de monopole familial sur ces charges puisque brassiers
et pagesos les exercent à tour de rôle : Delmau, Guisset,
Laporta
Or bon nombre de ces personnes sont devenus des alliés
de la famille Justafré, apparentés au baille ou à
ses cousins. Par le jeu des unions entre les nouvelles et les anciennes
familles, elles appartiennent à la maison Justafré.
Ce soutien fonctionne par exemple en 1775 lorsque la maison Justafré
est impliquée dans une histoire de contrebande de grains. La
famille utilise les services d'un avocat pour établir une défense
argumentée et démontrant les abus commis par les agents
de la Régie. Les magistrat de Las Illas fournissent également
un certificat : " Nous soussignés Michel Justafré
baile et J[osep]h Delmau et Paul Barris consuls de Las Illas certifions
en faisant la présente déclaration en foy comme le sieur
Pierre Justaffré habitant de ce lieu de Las Illas ont nous,
a faite obligation de nous fournir deux charges et demy grains d'un
ou autre pour semence pour les habitants de notre communauté
de ce lieu de Las Illas, et par la consummation, et sur tentation
de sa maison de la famille, ou le d[] Pierre Justaffré et obligé
de fournir le grain que nous avons accordé " [24]. Le
5 juillet 1775, Pierre Poeÿdavant, subdélégué
général de l'intendance du Roussillon, ne suit pas la
réquisition de l' " adjudicataire général
des fermes unies de France ". Il arrête les poursuites
contre Michel et Pierre Justafré et annule la saisie des grains
: " Nous subdélégué général
susdit fesant droit aux parties avons déchargé et déchargeons
lesd[] père et fils Justaffré des fins de l'assignation
à eux donnée par le susd[] procés verbal, leur
accordons pleine et entière main levée de la saisie
sur eux faite de neuf charges quatre mesures petit millet, dont le
sequestre sera tenu de leur faire la remise ". Les agents de
la Ferme ne peuvent alors que constater ce manque de sévérité
qui rend plus fréquentes les contraventions et rend illusoire
l'application " des loix du royaume, dans un endroit où
il est si facile d'y contrevenir, puisque la proximité de Las
Illes aux terres d'Espagne rend presque impossible de surprendre les
contrevenants dans le passage ". Les agents du roi ne sont pas
véritablement capables de surveiller cet espace frontalier,
ainsi le pouvoir des magistrats locaux en est-il renforcé,
tout comme leur indépendance. Apparaît ici l'ambivalence
de la seigneurie, qui d'une part part exige le respect de ses droits
et augmente les prélèvements fiscaux sur la communauté,
mais qui d'autre part, grâce à ses règlements
et son agent local, défend cette même communauté
contre les abus des paroisses voisines et des agents royaux. Lorsqu'en
1787, l'assemblée des habitants doit élire un syndic
et trois membres pour composer l'assemblée municipale, son
choix du premier magistrat se porte tout naturellement sur Michel
Justafré le baille. Finalement il existe une concentration
progressive des pouvoirs seigneuriaux et municipaux dans cette ancienne
famille qui construit et affirme son emprise sur ce terroir au cours
du XVIIIe siècle.
Le siège de ce pouvoir au sein de la communauté est
symbolisé par la métairie Justafré. Ce mas familial
nommé " mas Duran d'en Justafré " au XVIIIe
siècle devient le " mas del Baille " au XIXe siècle.
Ce qualificatif sert alors à distinguer les deux branches issues
de cette lignée, lesquelles dirigent deux importantes exploitations
à Las Illas et exercent alternativement les fonctions de maire
au début du XIXe siècle. Le prestige des fonctions passées
est rappelé en 1846 lorsqu'il s'agit de défendre les
intérêts d'un rejeton impliqué dans l'affaire
des Trabucaires, ces bandits rançonneurs et pilleurs de diligence
: son avocat " parlant de la famille de cet accusé, il
la représente comme l'une des plus honorables de la contrée,
puisqu'avant la première révolution, c'est dans son
sein qu'on choisissait les batlles, et depuis les maires " [25].
En conclusion, au cours du XVIIIe siècle, la famille Justafré
de Las Illas monopolise la fonction de baille, faisant de cette magistrature
seigneuriale un élément de son patrimoine héréditaire.
Cette évolution s'accompagne également d'une concentration
des charges municipales à travers divers représentants
directs ou indirects de leur parenté. Dans un contexte de relative
indépendance des institutions municipales, le baille de Las
Illas, de par son statut, garantit les droits seigneuriaux et le respect
des droits de la communauté.
NOTES
[1] La casa pairal est lamais maison des créateurs
du lignage, conservée sur plusieurs générations.
Elle est constituée des personnes vivant dans la même
maison et disposant d'un patrimoine commun, sous l'autorité
du cap de casa (chef de maison).
[2] Archives historiques de Gérone. Darnius 5, f°
11. Etablissement sur deux manses à Las Illas le 23 janvier
1551 par Pierre de Darnius à Michel Justafré, pagès.
[3] Nous utilisons l'orthographe de "baille" plutôt
que celle de l'ancien terme de bailli", qui apparaît au
XIIe siècle, car elle est plus proche du catalan "batlla"
que nous retrouvons dans les documents.
[4] AD66 : 1 E 34. Acte du 7 avril 1619.
[5] AD66 : 1 C 1767. Acte du 27 mai 1666. Le surnom de Calot
est un suffixe à Michael, indiquant que cette personne
est plus jeune qu'une autre portant ce même prénom.
[6] AD66 : 2 B 27. Registre C. F° 14 v° à
16r°.
[7] AD66 : 1 E 286. Prise de possession du 26 juin 1718.
[8] AD66 : 3 E 40/492. Prise de possession du 25 février
1727.
[9] AD66 : 3 E 16/508. Nomination de baille du 17 mars 1761.
[10] AD66 : 3 E 40/496. Conseil général de l'université
laïque de Las Illas du 5 mars 1741.
[11] La pignorade est le droit de saisir les animaux en infraction.
[12] AD66 : 1 E 34. Témoignage du 21 octobre 1662 de Joseph
Mas baille de Las Illas.
[13] AD66 : 1 E 34. Note du 5 septembre 1663 d'Antoni Cavaller,
juge ordinaire de la cour du baille du comte de Las Illas : "incarceribus
vice comitatus de Les Illas".
[14] AD66 : 3 E 40/425. Acte du 5 octobre 1701.
[15] AD66 : 11 Bp 1048. Cahier des informations de 1778.
[16] AD66 : 3 E 16/508. Acte du 17 mars 1761.
[17] AD66 : 3 E 40/295. Contrat de mariage du 18 septembre 1647,
retenu par Joseph Ferrer, notaire de Céret.
[18] AD66 : 3 E 40/494. Contrat de mariage du 29 octobre 1733, retenu
par Me Joseph Angles y Royros, notaire de Céret.
[19] AD66 : C 944. Rôle du vingtième de 1773.
[20] AD66 : 3 E 40/663, f° 20. Acte du 8 janvier 1782, retenu
par Me Jacques Companyo, notaire de Céret.
[21] AD66 : 3 E 40/526, f° 107. Acte du 26 février 1714,
retenu par Me Félix Companyo, notaire de Céret.
[22] AD66 : 3 E 40/493. Conseil général de La Selve
du 25 février 1729.
[23] AD66 : 3 E 40/496. Conseil général de La Selve
du 22 avril 1739.
[24] AD66 : 1 C 1026.
[25] Procès de l'association de malfaiteurs de Las Illas
dits Trabucayres, arrêt du 28 mars 1846, impr. Tastu, Perpignan,
page 36.
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